[Retour]


HEDDA OUROUCH

LES HOMMES DE MON KSAR 

UN EXEMPLE DE LOYAUTE

Comme promis, je laisse de côté le mercato marocain pour la constitution de l'équipe gouvernementale. Je fais 3ine Mika sur les tractations concernant le choix des candidats pour les futures élections présidentielles françaises. Je vais essayer de rendre hommage en quelques lignes à Hadda ou Rouch qui en son vivant était une vieille femme pauvre mais riche de sa fierté.

Je ne connais rien de sa jeunesse ni de sa famille. Lorsque j'étais enfant et adolescent, elle était déjà une femme très âgée mais dont le corps a été façonné par la dureté et ses conditions de vie au Ksar de Goulmima. Seules les personnes de mon âge et plus connaissent cette petite dame dont le courage et le franc-parler sont inversement proportionnels à sa petite taille.

Feu Hadda ou Rouch occupait une chambre dans la maison collective qu'était une Zaouia située dans la ruelle (la3lou) des Ait Hdidou à l'intérieur du Ksar. Elle vivait des aides que lui donnaient ses voisins et aidait des fois certaines familles  a la tâche quotidienne de fauchage de luzerne.

Après l'indépendance du pays, les habitants du Ksar comme un peu partout au Maroc se divisèrent en partisans du parti de l'Istiqlal (PI) ou du parti de Chora (PDI). Hedda devient une fervente militante du parti de l'Istiqlal puis de l'UNFP après la division du parti d'Allal Fassi.

Vint alors le référendum constitutionnel de 1962 que feu Hassan II avait proposé aux marocains et pour lequel l'UNFP a l'inverse de tous les autres partis du pays avait appelé à voter Non contrairement au vœu de Hassan II. Hadda fait alors du "Non" son cheval de bataille au point de jurer de tous les saints de Ghriss et d'Orient de ne jamais prononcer le "Na3am" (Oui) auquel le roi avait appelé tant qu'elle sera en vie.

Tout le monde au Ksar, au village et jusqu'au autorités locales savaient que Hadda a juré de ne jamais prononcer "N3am" (Oui) quelques soient les circonstances. 

Un jour, lors de la distribution de l'aide en produits alimentaires aux nécessiteux, de Goulmima, le caïd qui était présent demande aux personnes qu'on appelle pour leur remettre de l'aide de répondre par "N3am" dès qu'elles entendent leur nom.

Lorsque le Mokadem appela Hadda, celle-ci répondit par "Hayi" (je suis là) !

Le caïd l'interpella et lui demande de dire "N3am" (Oui).

Ce à quoi elle lui répondit: "La" (Non).

Que dire alors des cols blancs qui comme des girouettes qui tournent au gré des vents n'hésitent pas à changer de parti pour se faire une place au parlement ou garantir un poste de ministre ?

Que dire à part que la fierté et le respect des engagements pris ne sont pas l'exclusivité ni l'apanage  des lauréats des grandes écoles.

Hedda ou Rouch n'était pas d'ailleurs la seule personne à Goulmima qui était restée fidèle à ses convictions et à son parti. Un grand militant de l'Unfp du même Ksar n'avait pas supporté les appels répétitifs de la radio marocaine a voter "Na3am", qu'il a coincé son poste sur une station radio étrangère (radio Alger) et juré de ne plus jamais écouter la station de Rabat.

Mon grand-père qui lui était jusqu'à sa mort un fervent supporter de Addi ou Bihi, n'avait jamais cru au décès de son mentor. À chaque fois que je lui dis que Addi ou Bihi est mort et qu’il a été enterré à Rich, il me répondit avec force, que le premier gouverneur de Ksar-es-Souk, après avoir combattu au Shaba (Congo), est en train d’aider Ojukwu dans sa lutte  pour la sécession du Biafra du Nigeria. 

Et c'est ainsi que feu Hadda ou Rouch et de nombreuses personnes d'Ighrem N'Igoulmimen savaient rester droits dans leurs bottes jusqu'à leurs morts, bien avant qu'Alain Jupé sache rester droit dans les siennes !

Ainsi va Ghriss 

Agadir le 03/12/2016

[Retour]