Un dicton bien de chez-nous dit “Qui ne quitte pas le monde n’est pas à l’abri de son châtiment”. (Li makhrj men denya, ma khrj men 3kayb ha).
Cette citation contredit ceux qui croient que le destin d’un homme est toujours entre ses mains.
Comme moi, certainement qu’il vous est arrivé de vous arrêter devant un feu rouge à Casablanca, à Rabat ou à Paris et de croiser le regard d’un de ces hommes qui ont pris leurs enfants et qui ont fuit leur pays la Syrie, qui depuis plusieurs années est livrée à une guerre qui n’est pas la leur. Ces hommes posent sur nous un regard dans lequel se mélangent la tristesse, la désolation et une dignité malmenée par les aléas de la vie. Ils nous regardent sans oser tendre la main et sans dire un mot si ce n’est que par une formule de remerciements si nous leur remettons une pièce. Quand le feu passe au vert, nous poursuivons notre route en oubliant les hommes et leur silhouette dès qu’ils ont quitté notre champs visuel. Et pourtant derrière le regard de ces hommes se cache une histoire. Celle d’un médecin, d’un ingénieur ou d’un fonctionnaire qui, il y a quelques années menaient une vie familiale paisible et normale comme la notre. Ils avaient leur logement, leur voiture et ils se permettaient de voyager avec leurs enfants lors des vacances scolaires et des fois passer leurs congés annuel sur une des belle plages de leur pays. Ils n’ont jamais pensé se retrouver un jour dans la rue sans un sou et être obligés d’attendre qu’on leur fasse l’aumône. Leur attitude hésitante à tendre la main traduit leur méconnaissance de la pratique de la mendicité qui n’a jamais été la leur. Mais que ne ferait pas un homme dont les enfants pleurent de faim et qui le soir venu, dorment sous les ponts ou dans les gares routières ?
Les larmes des enfants de ces hommes les ont poussés à mettre en berne leur dignité jusqu’à faire douter les gens qui les croisent d’un quelconque manque de fierté de leur part.
La tragique situation que vivent ces familles déracinées doit nous faire prendre conscience qu’une anarchie peut générer d’énormes dégâts collatéraux et une situation que personne ne pourra plus contrôler après.
Des fois, je me demande si nous nous n’approchons pas de la citation d’un certain François Rabelais qui a cité de la science et de la conscience.
Ainsi va Ghriss
Washington le 24/02/2018