Devrons-nous être des incorrigibles optimistes comme l’était le valet "James" et continuer à dire que tout va bien dans notre royaume, alors que des manifestations de gens mécontents se succèdent ici et là pour dénoncer des manquements et des abus dans la gestion des affaires publiques ?
Notre silence ne serait-il pas aussi condamnable que celui qui incombe à ceux dont la responsabilité est d’informer qui de droit du mécontentement des habitants de certaines régions qui sont oubliées, marginalisées et laissées à la traine du développement que connait le pays ?
Gouverner c'est être aussi informé sur ce qui se passe et se prépare en dehors des arcanes du pouvoir, afin d'anticiper et trouver des solutions aux problèmes qui se dessinent et qui commencent à préoccuper la population avant qu'ils ne se compliquent et soient une source de manifestations, d'affrontements et de violence.
Je ne vais pas ici énumérer tous les domaines où l'Etat a laissé pourrir la situation sans avoir pris les devants comme il devrait le faire. Je me contente de n'en citer que deux cas qui risquent d'amplifier la fracture entre marocains et de mettre en difficulté notre unité et en péril la stabilité de notre royaume.
1 - Je ne comprends pas pourquoi les autorités marocaines après avoir fait l'éloge de la décentralisation par la création des régions autonomes pour que celles-ci prennent en mains leur destin et décident de ce qu'elles estiment bénéfique pour les habitants, tardent-elles à concrétiser dans les faits ce projet. Ne voient-elles pas que hier c'était au Sahara marocain que ça grondait et qu'aujourd'hui c'est au tour du Rif et d'Assamer (Sud-Est) et sans qu'on sache dans quelle autre région demain les habitants vont à leur tour sortir dans rue et manifester leurs mécontents. Les gens ne supportent plus la "Hogra" et l'injustice.
Certaines régions sont marginalisées au point où certains habitants meurent dans l'indifférence par manque de soins et d'infrastructures médicales malgré les richesses minières tirées de leurs sous-sols et dont profite l'Etat. Les habitants ne sont pas dupes, ils savent bien que lorsque les ressources minières seront épuisées, ils hériteront des trous et des galeries qui ne serviront que d'abris aux chauve-souris comme c'est le cas d'Ahouly et de Mibladene dans la région de Midelt.
2 - Le second problème est celui de l'officialisation effective de la langue Tamazight que certains continuent de freiner pour ne pas dire de combattre ignorant que par leur attitude ils poussent les amazighophones à réagir en manifestant à leur tour, leur hostilité pour la langue arabe.
Imazighène ne comprennent pas pourquoi ceux qui veulent imposer la langue arabe dans tous les rouages de l'administration marocaine usent du système de deux poids deux mesures en permettant aux gens et à l'administration l'utilisation des dialectes que sont la Darija et la langue Hassani, tout en refusant ce même droit à Tamazight ?
Cette ségrégation dont le but non avoué est de faire disparaître la culture Amazigh et après elle l'identité Amazigh du Maroc a été comprise même si c'est tardivement par imazighène et a eu l'effet inverse du but recherché par les « amazighophobes », car elle a réveillé en imazighène leur attachement à leur culture et à leur identité.
Ce qui m'inquiète, c'est de constater que la manière de gouverner de ceux à qui incombe cette honorifique mais lourde responsabilité ne suit pas la même évolution que la prise de conscience par les populations de leurs droits.
Et c'est avec gravité que je dis que si rien d'autre que la répression n'est entrepris pour remédier à cette situation, le clash malheureusement ne sera pas inévitable. Les manifestations du Rif et d'Assamer peuvent être comparées aux petites répliques qui précèdent un tremblement de terre. Elles peuvent se produire sans faire de dégâts mais peuvent être aussi le signal de la survenance d'un grand séisme; et c'est ce que je ne souhaite pas pour mon pays.
Ainsi va Ghriss
Washington le 13/05/2017
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